Entouré d'une chevelure brune bouclée, son visage s'éclaire fréquemment d'un sourire accueillant. La pasteure Anne-Laure Danet est toujours prête à s'arrêter quelques instants pour bavarder chaleureusement avec celui ou celle qui l'aborde.
Après avoir occupé différents postes au cours des années, du pastorat en paroisse par une responsabilité nationale au Pôle national de formation de l’EPudF, en passant par la coordination de la formation permanente des pasteurs de la CPLR, depuis quelques années, elle évolue au Défap, ce qui l'a conduite à voyager par monts et par vaux.
Anne-Laure, peux-tu te présenter plus précisément et expliquer ce que tu fais actuellement? Mais et tout d'abord, qu'est-ce que le Défap?
Le Service Protestant de Mission-Défap est le service missionnaire des Eglises réformées et luthériennes en France. Il a été créé en 1971, à la suite de la CEVAA, une communauté d’Eglises d’Afrique, du Pacifique, et des Eglises réformées et luthériennes de France, d’Italie et de Suisse. Cette période correspond à un changement de modèle missionnaire : d’un modèle paternaliste, on est passé à un modèle communautaire. Le Défap est le département français de la CEVAA, il développe aussi des liens avec des Eglises qui ne sont pas membres de la CEVAA.
De nos jours, comment comprend-on la notion de mission?
La mission au XXIème siècle cherche à développer un nouveau modèle. Depuis la création de la CEVAA, chaque Eglise est en mission là où elle se trouve enracinée. Il s’agit de s’adapter au contexte actuel pour répondre à notre vocation d’annoncer la bonne nouvelle de Jésus-Christ. Nous vivons dans une société mondialisée, sécularisée et multiculturelle et sommes confrontés à de nouvelles problématiques.
La mission aujourd'hui développe 3 axes :
-Evangéliser là où nous vivons,
-rendre visible l’universalité de l’Eglise,
-vivre l’interculturalité dans l’Eglise.
Existe-t-il encore des missionnaires qui s'engagent à vie à partir ailleurs?
Il n’y a plus comme autrefois de missionnaires qui partent à l’étranger. Tout croyant en Jésus-Christ est missionnaire, il est appelé à témoigner en paroles et en actes dans son existence personnelle et avec les autres par son engagement communautaire de l’amour de Dieu pour chaque femme et chaque homme de ce monde.
Entre Eglises, l’objectif est plutôt de nous entraider pour que chaque Eglise puisse pleinement être missionnaire.
Le ministère que tu exerces actuellement t'amène à effectuer des voyages fréquents. Où vas-tu en général?
Mon poste est d’abord de soutenir les Eglises réformées et luthériennes en France à maintenir vive cette dynamique missionnaire.
Concrètement, il s’agit de les visiter pour les encourager dans leur réflexion biblique et théologique en leur proposant des animations, des formations, des outils pédagogiques, et de les accompagner dans des projets avec des Eglises soeurs dans le monde.
Par ailleurs, je suis responsable des liens avec des Eglises protestantes au Nicaragua et particulièrement avec la faculté de théologie protestante de Managua, et aussi des liens avec l’Eglise réformée à Madagascar, la FJKM.
J'ai eu la joie de t'accueillir dans un de nos bureaux d'aumônerie quand j'étais sur la plateforme de Roissy, il n'y a pas si longtemps encore. Tu m'as dit que cette fois-là, comme souvent lors de tes voyages outremer, tu as reçu comme une gifle le contraste entre l'intense pauvreté du pays dont tu venais, et l'insolente richesse de nos aéroports européens: magasins de luxe à foison, restaurants et stands d'alimentation à tous les tournants de coursives, etc… Que peux-tu en dire?
Il est vrai que les écarts économiques Nord-Sud se creusent. Bien sûr, la crise économique touche l’Europe, et il y a aujourd’hui une réelle précarité pour bon nombre de nos concitoyens. Mais c’est sans commune mesure avec ce que j’ai vu à Madagascar qui vit un véritable drame humanitaire, même si des signes d’améliorations sont notables depuis les dernières élections.
La mission consiste à ouvrir nos yeux, à élargir notre regard sur d’autres réalités que les nôtres.
C’est précisément dans ce contexte que les liens avec les Eglises sœurs dans le monde rendent visible cette unité en Christ, par l’intercession, la solidarité vécue dans une dynamique de réciprocité où chacun est reconnu comme un frère, une sœur.
Dans cette perspective, nous cherchons à développer des rencontres sous de multiples formes : jumelages, camps de jeunes, envoyés pour des périodes d’un ou deux ans pour du soutien dans des domaines demandés par les Eglises elles-mêmes (enseignement, santé, agriculture, etc.)
Ta mission consiste-t-elle essentiellement à enquêter sur la situation des populations auxquelles tu rends visite, ou cherches-tu à participer à la création d'une plus grande solidarité entre les peuples, les églises et les pays avec pour but une plus grande justice et davantage d'équité?
Il s’agit de témoigner des valeurs du royaume de Dieu. Elles commencent par la paix, c’est à dire la réconciliation avec Dieu, avec soi-même et avec les autres, entre les peuples.
Il n’y a pas de paix sans justice. Dénoncer les injustices, lutter contre tout ce qui avilit l’être humain et témoigner d’une vie libre, apaisée et réconciliée est notre travail missionnaire. A chaque situation, il est nécessaire d’en trouver les formes concrètes.
Evidemment, nos actions sont modestes, l’essentiel est qu’elles soient signe d’espérance et de vie renouvelée.
propos recueillis par Anniel Hatton
Pour en savoir plus:
http://www.defap.fr/